lundi 28 avril 2014

Miss Alabama et ses petits secrets - Fannie Flagg

Présentation de l'éditeur: Birmingham, États-Unis. Ex-Miss Alabama, Maggie Fortenberry a pris une grande décision : elle va mettre fin à ses jours. Elle n'est ni malade ni déprimée, son travail dans une petite agence immobilière est plutôt agréable, mais elle a trouvé malgré tout seize bonnes raisons d'en finir, la principale étant peut-être que, à 60 ans, elle pense avoir connu le meilleur de la vie.
Maggie a donc arrêté la date de sa mort et se consacre désormais en toute discrétion à en régler les détails.
Or, peu de temps avant de passer à l'acte, Maggie est invitée par une collègue, Brenda, à un spectacle de derviches tourneurs. La représentation étant dans moins d'une semaine, elle décide, pour faire plaisir à Brenda, de retarder l'ultime échéance.
Elle est alors loin de se douter combien les jours à venir vont être riches en secrets dévoilés et en événements imprévus, lesquels vont lui montrer que l'existence a encore beaucoup plus à lui offrir qu'elle ne le croyait. 


C'était la grande news du moment, le grand cirque intérieur: l'arrivée dans nos librairies le 5 mai prochain du dernier roman de Fannie Flagg, Miss Alabama et ses petits secrets. Comme beaucoup d'entre vous j'en suis sûre, la nouvelle a causé un choc aussi bien que le ravissement le plus complet. Si vous ne connaissez pas encore Fannie Flagg et son célébrissime Beignets de tomates vertes, je ne peux que vous encourager à le lire. C'est un roman doudou comme je les aime: Le Sud des États-Unis, une fratrie et ses valeurs ajoutées, un rien turbulente, des personnages très attachants et des recettes d'Alabama (si si c'est vrai), vous ne pourrez pas être déçu. En plus, bandes de veinards, il y a même un film!

Mais revenons à nos moutons. Miss Alabama et ses petits secrets est sorti en 2010 aux États-Unis. L'auteure ne quitte pas son Sud adoré et nous explorons les quartiers de Birmingham car cette ancienne Miss Alabama est à présent agente immobilier dans sa ville natale. Maggie a la soixantaine, est encore magnifique mais n'a rien vraiment accompli dans sa vie. Sans dire qu'elle a raté sa carrière, elle doit surtout sa reconversion à Hazel, la naine pétulante qui fonda l'agence immobilière des années auparavant. Mais voila, à présent Maggie est seule. Son amie Hazel est morte, l'agence décline, Maggie n'a pas d'homme dans sa vie, pas d'enfants, plus de famille pour tout dire, elle se sent bien désœuvrée et n'a plus de projet. Dès lors, pourquoi continuer à vivre une routine amère? C'est donc sereine qu'elle planifie son suicide - qu'elle compte maquiller en disparition - méticuleusement. C'était sans compter sur Brenda, sa collègue et amie, une petite bonne femme noire à perruque, candidate à la mairie de Birmingham. Pour lui faire plaisir, Maggie décide de repousser son suicide, une décision qui va se révéler plus étonnante que prévue.

Je ne sais pas trop comment vous parler de ce roman finalement parce que je ne voudrais pas décourager les fans de Fannie Flagg mais je ne veux pas non plus faire un éloge dithyrambique d'un roman que j'ai bien aimé mais sans plus. Dilemme, dilemme. Avouez que c'est plus grand dilemme que celui de Chimène et Rodrigue!

Je pense que j'attendais tellement de Miss Alabama que j'ai été fatalement déçue. C'est le problème après un excellent livre, on attend tellement du suivant que la déception est un risque à prendre. Miss Alabama n'est pas un mauvais livre loin de là, c'est simplement qu'il manque ce petit ingrédient magique qui a fait des Beignets de tomates vertes un roman inoubliable.

J'ai beaucoup aimé les personnages d'Hazel et Brenda même si j'ai trouvé dommage qu'ils soient relégué au second plan. Hazel est un vrai personnage à la Flagg: c'est une naine mais qui ne se laisse jamais démonter par la vie ou sa petite taille. Après tout, lorsqu'on la voit on ne l'oublie pas, elle est intelligente et enthousiaste, du coup pourquoi s'en faire? C'est une petite perle de sucre comme on les adore chez cette auteure. Malheureusement elle n'apparait que par flashback ou évocation des personnages ce qui la rend trop rare à mon goût. Cela dit, le procédé est intéressant car on ressent un vrai manque, à la façon de Maggie. Quant à Brenda, je l'adore, elle me fait penser au personnage de la couleur des sentiments ou des suprêmes. J'aurai vraiment adoré qu'elle soit l'héroïne car elle a beaucoup de saveur. Entre son combat pour l'égalité des gens, la mairie et sa lutte contre ses kilos en trop, Brenda est aussi un personnage Flaggien adorable.
Barbs, la vilaine du roman est une affreuse harpie qu'on a envie d'étrangler. Après un mari violent, c'est au tour d'une femme sans scrupule de faire l'objet de l'ire de l'auteure. C'est une bonne femme absolument effroyable qui nous est dépeint! Positivement affreuse mais on y croit, le personnage sonne vrai. Pas de rire narcissique, pas de pose, juste de la méchanceté et de la malhonnêteté en boîte.

J'ai beaucoup aimé aussi la description de Birmingham. On sent que l'auteure aime cette ville et la connait bien. On navigue ainsi entre les différents quartiers, anciennement quartiers blancs et noirs, et surtout "la colline", là où se trouve les demeures les plus prestigieuses. Miss Alabama explore aussi les problèmes sociaux qu'a traversé la ville, notamment ceux liés aux mouvements pour les droits civiques. Cette histoire de la ville est vue à travers les expériences des différents protagonistes et même si ce n'est pas poussé au point de La couleur des sentiments, ce n'est pas non plus le propos.

Ce qui m'a le plus dérangée finalement, c'est l'héroïne...Maggie est parfaite dans son genre. Toujours très élégante, elle est calme, posée, elle a du charme en plus d'être belle et surtout tout est parfaitement en ordre dans sa vie. Elle organise son suicide comme d'autres une soirée avec monsieur l'Ambassadeur. Elle ne doit laisser aucune dette, aucun vêtement qui ne soit pas donné à qui de droit etc. L'ensemble est fatigant. Je comprends le personnage mais je ne m'y attache pas du tout. J'ai ressenti le tout comme assez froid, dénué de sentiments. Ce que j'aimais dans Les beignets de tomates vertes c'était justement la vie qui battait dans les personnages et leur histoire alors qu'ici Maggie est tellement concentrée sur son suicide que le récit devient plat. J'ai eu du mal à m'intéresser à l'intrigue principale du coup et j'ai trouvé quelques ressorts un peu prévisibles.

Je suis triste de ne pas avoir accroché avec Maggie, parce que j'étais prête à adorer ce roman et à en faire un coup de cœur absolu. Ne croyez pas que c'est un roman raté, c'est un très bon moment de lecture mais on passe à côté du chef-d’œuvre des tomates vertes. Je vais aller me consoler avec le film tient!

mercredi 23 avril 2014

Intrigue à Giverny - Adrien Goetz


Présentation de l'éditeur: Et revoici Pénélope, l’intrépide Pénélope, dans le tourbillon d’une enquête pleine de mensonges, de meurtres et de Monet. Alors que la fameuse conservatrice-détective assiste à un dîner au Musée Marmottan-Monet, deux fines connaisseuses de l’œuvre du grand peintre impressionniste disparaissent. Le lendemain, l’une est retrouvée morte alors que l’autre, une religieuse du nom de sœur Marie-Jo, est aperçue à Monaco par Wandrille, le compagnon de Pénélope - Monaco où doit avoir lieu l’achat d’une toile inédite de Monet pour célébrer le mariage du prince Albert et de Charlène.
Qui est la mystérieuse sœur Marie-Jo ? Pourquoi la Principauté ? Et qui a tué Carolyne Square ?  Pénélope et Wandrille courent de Charybde en Scylla et de Giverny à Monaco pour tenter de résoudre ce mystère. L’amitié de Monet avec Georges Clemenceau va soudain prendre sens. Quelle a été l'étrange vie du paisible M.Monet ?

Pénélope et Wandrille reviennent chez Adrien Goetz pour une nouvelle intrigue. Après Intrigue à l'anglaise, Intrigue à Versailles et Intrigue à Venise, le lecteur est plongé dans le mystère de Giverny et de la vie de Monet. 

J'aurai dû aimer Pénélope et Wandrille. Tout d'abord, parce que je suis conditionnée pour aimer les intrigues de ce genre qui empruntent à Agatha Christie, Maurice Leblanc ou Georges Simenon. Ensuite parce que je ne suis pas censée résister à une héroïne qui s'appelle Pénélope et qui est conservatrice. Mystère + histoire + une Pénélope, je devais aimer....et bien non.

Quelle cruelle déception, ça me rend triste tient! C'est toujours désolant d'être déçu par un roman. Je n'avais pas lu les premiers opus mais ce n'est pas ça qui m'a dérangée. J'ai vite compris les relations qui unissaient Pénélope et Wandrille, que ce dernier était fils de ministre récemment retourné au pouvoir et qu'il venait d'être nommé rédacteur en chef d'un magasin de jardin monégasque. Jusque là...pas d'anicroche. J'ai compris aussi que Pénélope après un premier poste assez prestigieux se retrouve aux gobelins et s'intéressent de près à Monet depuis qu'ils ont redécouvert des tapisseries - les serpillères comme ils les appellent. 

Les personnages étaient assez sympathiques, un petit couple qui se piquent d'être détective, un peu d’esbroufe même si l'ensemble est moins frais que Tuppence et Tommy Beresford, une sœur mystérieuse, un meurtre, des tableaux qui apparaissent ou disparaissent: les ingrédients étaient intéressants. 
L'intrigue est vraiment bien inscrite dans un contexte actuel. L'auteur se replace dans l'époque en suivant l'actualité instant par instant, ici une exposition au musée Marmottan-Monet ou bien le mariage d'Albert de Monaco. C'est assez agréable de sentir le roman pris dans notre réalité. Cela lui donne un relief bienvenu que l'on retrouve peu ailleurs. Il y a même des petits clins d’œil à des personnalités connues comme une conversation que surprend Pénélope entre une certaine Clémentine et un Franck (les aficionados des émissions d'Histoire pour grand public reconnaitra sans peine de qui Adrien Goetz parle) et ça m'a faite sourire. 

Cependant, malgré toutes ces qualités, je me suis très vite lassée des aventures de Pénélope et Wandrille. D'une part, l'intrigue principale m'a laissée de marbre. Monet aurait-il été un espion à la solde de Clemenceau? Pourquoi et comment est-il devenu si riche? En fait je n'y ai pas cru du tout, c'est peut-être trop contemporain pour moi pour le coup mais je ne me suis pas laissée embarquer dans l'histoire. De plus, j'ai trouvé le récit extrêmement brouillon. Je m'explique:
L'histoire commence par le meurtre de Carolyne Square et la lecture du petit encadré relatant le meurtre par Wandrille, assis au soleil à la terrasse d'un café monégasque. Nous revenons ensuite deux jours plus tôt pendant le cocktail donné à Marmottan-Monet puis nous passons à Wandrille puis retour à la veille de la réception etc etc. Ces allers-retours m'ont rebutée, j'avais l'impression d'avoir une histoire pas dans le bon ordre sans que cette chronologie bouleversée apporte quoi que ce soit de positif ou d'intéressant à la narration. Dommage car dès le début cela a cassé mon intérêt pour l'intrigue. Là où Agatha Christie nous aurait dépeint par le menu les gens à table avec Pénélope dont cette sœur Marie-Jo et Carolyne Square, Adrien Goetz nous donne des bribes finalement peu engageantes. J'imaginais déjà ce que Dame Agatha aurait pu faire d'une telle scène et j'étais déçue de ne pas retrouver un grain de malice semblable. 

Du coup je me suis franchement ennuyée, heureusement le roman est court, la sauce n'est pas délayée à l'infini. Je ne deviendrai pas une fan de Pénélope et Wandrille et ça me peine, mais c'est comme ça. Et vous? Avez-vous déjà lu les Intrigues d'Adrien Goetz?

mardi 22 avril 2014

Luther l'alerte - Neil Cross


Présentation de l'éditeur: Tous ses collègues s'accordent à le dire : John Luther est un excellent flic. Un homme impressionnant par son physique et ses principes ; un détective intuitif admiré pour ses résultats. Mais la réalité est plus sombre. A force de côtoyer le mal, Luther est en train de perdre pied. Une situation qui inquiète son épouse, impuissante à apaiser ce mari lancé dans une guerre personnelle contre le crime. Et face à un tueur d'enfants qui joue avec ses nerfs, combien de temps Luther parviendra-t-il à rester du bon côté de la loi ?


Si le nom et la couverture de ce roman vous disent quelque chose il y a deux possibilités: primo, que vous l'ayez déjà lu et dans ce cas, bravo, secundo, que vous soyez un amateur de la BBC et du polar anglais et que du coup, vous ayez déjà vu ou entendu parler de la série Luther où le héros est incarné par un Idris Elba magistral. Personnellement, comme je suis TOUJOURS à la bourre, je fais partie de la catégorie 2.b qui a déjà entendu parler de la série, a vu des extraits sur youtube mais n'a pas encore eu l'occasion de visser ses fesses dans un canapé assez longtemps pour mater un épisode entier. Forcément, quand Luther l'alerte est sorti en poche, j'étais super intriguée, poussée par une force maîtresse vers ce petit opus à la couverture sanglante. Oui je sais je suis vachement lyrique aujourd'hui mais c'est parce qu'on est dimanche et que je travaille, enfin là présentement non, mais vous saisissez l'idée globale du bazar. 

Je me demandais un peu si ce roman arrivait à la suite de la série, ce qui m'aurait rendue super triste, je n'aurai pas voulu me spoiler, ce serait trop bête mais Neil Cross, l'auteur de la série britannique star, pense à tout. Il nous plonge cette fois dans la toute première aventure de son héros, un prequel pour mieux comprendre John Luther et l'individu violent qu'il commence à devenir.

L'intrigue est assez violente, des familles massacrées - avec détails s'il vous plaît - des enfants enlevés, un type complètement fou à poursuivre. En plus de ça, John Luther doit rendre service à son collègue qui vient de se faire passer à tabac pour avoir aidé un vieux militaire à conserver sa maison. Au prise avec un mafieux et ses acolytes, Luther franchit la limite de la loi et se voit coller les services internes aux fesses. Rien que ça.

J'ai beaucoup aimé le personnage de Luther que je trouve très attachant. Il voit des crimes horribles au quotidien et doit gérer à la fois l'amour qu'il éprouve pour son travail mais aussi sa rage. Sa femme en revanche m'a passablement gonflée. Elle sait qu'elle est injuste envers son mari mais ça ne l'empêche pas de le tromper quand même en tentant vainement de se déculpabiliser. Comment te dire chérie, ton mari vient de découvrir une mère ouverte en deux, on lui a pris son bébé et il le cherche...effectivement il n'a pas trop le temps de s'occuper de toi là...my eyes are rolling so hard I can see the back of my brain...
C'est typiquement le genre de personnage que je déteste dans les romans policiers. J'imagine que lorsque tu épouses un inspecteur ou une inspectrice de l'unité des crimes violents, tu peux t'attendre légitiment que ton/a conjoint/e ne soit pas toujours en super forme. Il semblerait que ce ne soit pas évident pour tout le monde.

Sinon les collègues de Luther sont également sur la brèche et s'était intéressant à lire. Il n'y a pas que lui qui plonge, les autres inspecteurs sont eux aussi victimes de leur métier. Entre celui qui traque les pédophiles sur internet et qui doit se gaver de films d'horreur coréens pour pouvoir dormir, la jeune qui ne passe quasiment aucun moment avec son compagnon ou la cheffe qui doit laisser sa fille de 10 ans dormir chez les voisins, aucun n'est indemne.

L'histoire est bien maîtrisée, avec pas mal de rebondissements, de croisements d'intrigues appréciables. Une bonne idée donc d'avoir lancé ce prequel, cela permet d'approfondir notre connaissance du personnage.

Une histoire choc digne des grands thrillers américains, un héros auquel nous sommes immédiatement attachés, une violence permanente, Luther L'alerte nous plonge irrémédiablement dans la descente aux enfers d'un homme courageux. Pour tous les amateurs de romans policiers à l'anglaise, que vous connaissiez la série ou non.

samedi 19 avril 2014

Sacrées souris - Lois Lowry

Présentation de l'éditeur: Pour vivre nombreuses, vivons cachées. Hildegarde, la Maîtresse Souris qui préside à la destinée des deux cent vingt souris de l’église Saint-Bartholomew, le sait bien. Toutes doivent apprendre à se faire discrètes pour ne pas effrayer les dames du comité paroissial. Elles savent que, sinon, une terrible épreuve les menace : le Grand X. Mais le danger devient de plus en plus proche. Ce sera bientôt le jour de la Bénédiction des Animaux, et les habitants de toute la région viendront à l’église avec leurs chiens, leurs chevaux et… leurs chats.

On connaissait Lois Lowry pour son excellent roman dystopique Le Passeur  - que je recommande chaudement, c'est un grand livre qui fait réfléchir à la manière de 1984 d'Orwell - voici qu'elle nous revient avec un roman pour les plus jeunes Sacrées souris!. Lois Lowry n'a plus besoin de faire ses preuves, ses romans pour enfants sont de petites perles à savourer. Si dans le Passeur, elle nous proposait une véritable réflexion sur la société, dans Sacrées souris!, c'est le parcours de toute une communauté qu'elle met en scène.

Hildegarde n'a pas la tâche facile. Lorsque l'on doit gérer 220 souris d'église, il n'est pas question de dormir sur ses lauriers. Entre une souris qui se permet de mettre bas sans la prévenir, sa rivale qui veut prendre sa place, la Bénédiction des animaux qui approche à grand pas et la menace du grand X qui plane toujours sur leurs têtes, Hildegarde aurait bien besoin de repos. 

Le roman a beau être court, il n'en est pas moins dense: riche de sens et de symboles. Hildegarde est un personnage assez hors norme qui m'a marqué par sa personnalité de cheffe bien trempée. Elle est dure, à la fois envers les membres de sa communauté - untel est assez stupide, telle autre n'arrête pas de mettre bas et ça la dégoûte - mais aussi envers elle-même. Elle s'astreint à une discipline et une rigueur qui font d'elle une parfaite souris d'église. 
Je n'ai pas trouvé le personnage d'Hildegarde sympathique car il faut avouer qu'elle ne l'est pas mais elle est remarquable par son dévouement pour sa communauté et ses talents de cheffe. Pas facile d'être une souris qui prend de l'âge et qui se sent investie d'une mission pareille. 

Comme souvent avec Lois Lowry, on sent bien l'importance de la religion chrétienne, c'était déjà le cas dans le Passeur sous forme de symboles, ici, ce sont plutôt les rituels qui sont mis en avant. Cependant, cet aspect du roman n'est pas gênant pour celles et ceux qui ne seraient pas croyant car elle sait bien utiliser son cadre afin de planter un décor et une ambiance, sans jamais faire de prosélytisme. Au contraire, c'est même intéressant de voir ces petites souris, à la manière de celles de Cendrillon, s'affairer pour que tout fonctionne dans l'église: rogner les fils qui dépassent des coussins ou des chasubles, nettoyer les taches faites par le vin de messe ou encore les voir chanter les cantiques d'église le dimanche.
Le roman ne manque également pas d'humour car à côté de l'austère Hildegarde, il y a toute une galerie de personnages assez truculents, avec leurs remarques farfelues ou joyeuses. Entre évitement des hommes et sauvetage impromptu, Hildegarde nous entraîne avec sa marmaille dans les tréfonds d'une petite église de campagne et de ses rituels jusqu'à l’apothéose final!

Un très joli roman, plein de rebondissements et d'entraide. De sacrées souris en somme que je vous engage à découvrir. 

dimanche 13 avril 2014

Avis de tempête - Harry Dresden Files tome 1 - Jim Butcher

Présentation de l'éditeur:


Harry DRESDEN
Enquêtes paranormales.
Consultations & conseils.
Prix attractifs.


Tous les bons magiciens s’appellent Harry, et Harry Dresden est le meilleur. Techniquement, c’est même le seul dans sa « catégorie » : lorsque la police de Chicago est sur une affaire qui la dépasse, c’est vers lui qu’elle se tourne. Car notre monde regorge de choses étranges et magiques… et la plupart ne s’entendent pas très bien avec les humains. La magie, ça vous flingue un gars en moins de deux !

Je sais, je suis toujours en retard pour découvrir les séries géniales que tout le monde connait depuis des lustres - Cheshire tu te tais s'il te plaît - mais après tout comme dirait le proverbe, mieux vaut tard que jamais. J'étais un peu en panne de lecture; les nouveautés c'est bien mais il faut savoir parfois revenir aux sources. Ni une ni deux je me suis jetée sur Harry Dresden et son look de privé des années 50. Grand bien m'en a pris. Je devrais arrêter de douter des recommandations qui me sont faites, un point c'est tout.

C'est d'abord l'atmosphère qui m'a séduite dans ce premier tome des aventures d'Harry Dresden. On ne sait pas trop où l'on débarque, sans doute dans un de ces polars noirs des Etats-Unis, ambiance 1950. Privé en imper, jeune dame à voilette noire qui cache une larme, l'adultère comprenez-vous. Sauf qu'Harry Dresden est magicien...oui tout de suite on n'est un peu moins dans l'ambiance. Harry est donc magicien et détective privé, ça ne s'invente pas. Consultant pour la police, il se retrouve bientôt au centre d'une enquête qui le dépasse.

J'ai adoré le personnage d'Harry Dresden. Il est dans la purée jusqu'au cou mais ne manque jamais de faire rire le lecteur. Tout, mais absolument tout, tourne mal autour de lui, ce mec porte vraiment la poisse et pourtant on rit beaucoup. Il y a un petit air de Charley Davidson (ou plutôt Charley a un petit air de Harry Dresden): deux enquêteurs dans le paranormal, deux personnalités qui attirent les ennuis...Les ressemblances s'arrêtent là mais j'ai bien aimé cette petite réminiscence d'une autre série.

À côté de l'humour et du personnage principal j'ai grandement apprécier le fait que l'univers d'Harry Dresden soit complexe, on le sent bien, mais que tout ne soit pas expliqué dès le premier tome. En effet, il s'agit surtout ici d'une introduction à un univers magique, riche et dense. Cela promet de nombreux épisodes bien croustillants, ne serait-ce que sur le passé d'Harry. À la fin du premier tome, on en sait finalement très peu sur le monde d'Harry, sur l'organisation de la magie et même sur les autres créatures existantes. Si on croise bien une vampire, la rencontre est brève mais promet de futures passes d'armes intéressantes.
J'aime bien le fait que l'introduction soit mesurée et non massive, c'est absolument destructeur de balancer des explications à la louche et sans discernement. Jim Butcher évite l'écueil sans soucis. 

Un très bon démarrage pour cette série d'Urban Fantasy que je vais poursuivre avec grand plaisir.

jeudi 3 avril 2014

Les suprêmes - Edward Kelsey Moore


POUR CELLES ET CEUX QUI ONT AIMÉ "LA COULEUR DES SENTIMENTS" ET "LES BEIGNETS DE TOMATES VERTES"

Présentation de l'éditeur: Elles se sont rencontrées à la fin des années 1960 et ne se sont plus quittées depuis : tout le monde les appelle “les Suprêmes”, en référence au célèbre groupe de chanteuses des seventies. Complices dans le bonheur comme dans l’adversité, ces trois irrésistibles quinquas afro-américaines aussi puissantes que fragiles ont, depuis leur adolescence, fait de l’un des restaurants de leur petite ville de l’Indiana longtemps marquée par la ségrégation leur quartier général où, tous les dimanches, entre commérages et confidences, rire et larmes, elles se gavent de nourritures diététiquement incorrectes tout en élaborant leurs stratégies de survie.

Vous vous imaginez bien qu'avec un résumé pareil et une couverture qui sent bon les années 60', j'étais O-BLI-GÉE de le lire. Comment ça, je suis d'une mauvaise foi éhontée? Oui bon, peut-être. J'adore les récits qui se passent dans le sud des Etats-Unis au sein des communautés afro-américaines. Je ne sais pas pourquoi, mais la chaleur du Sud, la bonne odeur du poulet frit et le parler un peu trainant des gens du coin m'ont toujours séduite. Cette vision idyllique doit évidemment être nuancée par la ségrégation raciale, il suffit de lire La couleur des sentiments pour s'en convaincre, mais j'aime toujours autant le Sud des États-Unis, bien plus que New York. C'est donc avec un avant-goût de bonheur que j'ai ouvert Les suprêmes d'Edward Kelsey Moore. 

Odette, Clarice et Barbara Jean, c'est un peu les filles de Skeeter, Minnie Jackson et Abileen. Nées dans les années 50, elles se sont rencontrées alors qu'elles étaient encore gamines et ont grandi ensemble depuis, main dans la main à travers toutes les épreuves de la vie. Si la ségrégation raciale se dilue durant leur enfance, certaines auront tout de même à en souffrir. 
Nous retrouvons donc nos Suprêmes en 2005, chez Big Earl, le dimanche après la messe - chacune dans une paroisse différente - pour le traditionnel repas dominical. Les Supêmes sont entourées de leurs maris, amis eux-aussi depuis près de quarante ans. Edward Kelsey Moore passe du passé au présent pour recomposer le parcours et la personnalité de ses trois femmes que l'on rêverait de rencontrer. 

Il y dans ce roman, une sorte de discours à trois voix comme dans la Couleur des sentiments, Odette est la seule qui bénéficie d'un récit à la première personne du singulier tandis que Clarice et Barbara Jean ont le droit à la troisième du singulier. J'ai bien aimé cette différence de traitement entre les trois personnages, il n'y a finalement rien de déséquilibré et ça semble naturel. Cela donne un peu plus de poids à Odette sans vraiment affaiblir Clarice ou Barbara Jean. Edward Kesley Moore parvient sans peine à donner une vraie vie et un poids particulier à chacune de ses trois héroïnes.

J'ai adoré le personnage d'Odette, sans doute parce que c'est elle dont on connait le mieux la voix, mais aussi parce que c'est personnage incroyablement fort et attachant. Un croisement entre Abileen - qui devine toujours tout - et Minnie - avec sa grande gu***** - Odette est le pivot central de l'amitié des Suprêmes. Avec son mari James, elle forme le couple le plus équilibré de la bande....mais c'est sans compter sur le fait qu'Odette voit des fantômes. Comme sa mère. Tare familiale qu'elle tente de cacher aux autres, c'est une femme forte, une amie réelle sur laquelle les autres peuvent s'appuyer à tout moment. 
Clarice, c'est une snob. Un petit bout de bonne femme qui fait attention à sa ligne, sait impeccablement tenir une maison et gère sa vie à la baguette. Sauf lorsqu'il s'agit de son crétin de mari, Richmond qui la trompe avec le moindre derrière remuant venu. Volontiers mesquine, parfois méchante, elle sait reconnaître ses tords et n'hésite pas à aller de l'avant, à s'épanouir pour ressembler plus à son amie Odette qu'elle aime plus que tout. Même si c'est celle avec laquelle j'ai eu le moins d'affinité, Clarice est touchante parce qu'elle exorcise son mal-être dans la pratique du piano et que mine de rien elle évolue.
Barbara Jean enfin - ah que j'aime les Jean et Mae annonciatrices du Sud - malmenée par la vie est sans conteste la plus bouleversante des trois. Entre son mari Lester, de vingt ans son aîné, son passé douloureux, et son amitié indéfectible des suprêmes, Barbara Jean ne pouvait être qu'une femme touchante qu'on aurait envie de réconforte un peu comme la patronne de Minnie Jackson.

L'auteur aime énormément ses héroïnes et nous dépeint leur vie à travers leurs manies, leurs forces et leurs faiblesses. On pleure un peu, on rit beaucoup mais toujours dans la nuance. J'aime assez que le récit soit ramassé, sans trop de fioritures ni de détails inutiles. Pas besoin de tout expliquer au lecteur, on comprend bien où il veut en venir.

Allez, je me tais sinon je risque de trop en dire et ça serait dommage. Si vous aimez les ambiances du Sud des USA, si vous aimez Fannie Flagg et La couleur des sentiments, alors n'hésitez pas. Les suprêmes est un roman adorable, plein de tendresse et d'émotion, plein de rire et de larmes pour passer un très bon moment auprès de ces trois femmes attachantes.